Depuis 2015, la République Démocratique du Congo compte 25 provinces plus la ville de Kinshasa, capitale du pays élevée au rang de 26eme Province. Parmi les dernières nées des provinces, figure la province du Tanganyika. Démembré de l’ancien Katanga, le Tanganyika est la troisième provinces du pays avec 134,940 km ² de superficie derrière la Tshopo et le bas Uelé qui ont respectivement 199,53 km² et 148,2km².
Nanti des ressources naturelles diversifiées tant halieutiques, du sol que du sous-sol, le Tanganyika regorge de potentialités énormes pouvant lui permettre non seulement de booster son développement mais aussi celui de tout le pays y compris de toute la région des grands lacs.
Par sa position géographique, le Tanganyika se positionne comme un pool commercial important grâce à son ouverture directe sur la Zambie et la Tanzanie à travers le port de kalemie. Ce port, l’un des plus grands en Afrique, constitue, l’une des principales sources de revenus de la province. Il s’y déroule toutes sortes de transactions commerciales entre kalemie et Uvira au sud Kivu, kalemie-Kigoma en Tanzanie, Kalemie- Pulungu en Zambie et Kalemie- Moba en RDC.
Au-delà de ce lac qui borde la ville de kalemie, chef-lieu de la province du Tanganyika et qui prédispose cette dernière à une éclosion touristique grandiloquente avec des paysages naturels à couper le souffle le long du lac, la province du Tanganyika est parsemée des sites touristiques riches en histoire telle que celle liée à la route des esclaves qui, partis du Maniema, devaient passer par le nord de kalemie jusqu’à Bagamoyo en République Unie de Tanzanie; des îles paradisiaques, des chutes et des rapides à l’instar des chutes portes d’enfers de Kongolo, des réserves naturelles comme celle de Kabobo située dans les quelques encablures de la ville de kalemie sur la route Bendera en territoire de kalemie où plusieurs espèces tant végétales qu’animales assurent l’harmonie naturelle et l’équilibre des écosystèmes.
Doté d’une hydrographie abondante et d’une faune danse, d’un sol fertile et du sous-sol riche en minerais stratégiques, le Tanganyika est aussi propice à l’agriculture grâce à ses vastes étendues des terres arables propices à la culture du maïs, de riz, du manioc, d’arachides, de haricots et d’autres céréales comme le soja, le sorgho, l’igname…. La vallée de la Rugumba qui constitue une véritable aubaine pour une riziculture extensive demeure à ce jour presqu’inexploitée. Il sied également de mentionner les vastes verdures des plateaux de pepa en territoire de Moba où l’élevage industriel de bovins peut s’y développer allègrement et catalyser la production de lait, des fromages et des viandes fraîches dont les mets rivaliseraient avec ceux des poissons du lac Tanganyika ou de la rivière Lukuga au grand bonheur de l’humanité !
Le Tanganyika est aussi riche en palmier élaïs dont la culture coordonnée peut à aboutir à la production d’huile de palme avec une incidence positive sur une gamme variée des produits dérivés comme le savon, les huiles palmistes….
L’abondante hydrographie du Tanganyika fournit à cette province, un énorme potentiel énergétique pouvant non seulement supporter une grande activité industrielle mais aussi de desservir toute la population en électricité. Réhabilités, les barrages de Mpiana Mwanga à Manono, de Kimbi à Bendera, de Kilubi à Moba auxquels il faut ajouter la construction de celui de Kongolo sur les chutes des portes d’enfers, les besoins énergétiques du Tanganyika peuvent être largement couverts !
Le sous-sol du Tanganyika n’a pas cessé d’attirer l’attention des opérateurs miniers à cause de la découverte d’importants gisements lithium, de cassitérite et de coltan en territoires de Manono et de Nyunzu précisément à kisengo ; une des rares contrées du pays à disposer d’une raffinerie de coltan. Avec le développement des nouvelles technologiques, il faut absolument réconcilier l’impératif de créer une adéquation entre la compétitivité industrielle et la nécessité de lutter contre l’émission des gaz à effet de serre tributaire effectivement de cette forte activité industrielle, le lithium de Manono est au cœur d’un vaste projet de construction d’une usine des fabrication des batteries électroniques à base notamment du lithium, du cobalt….
Porté par le gouvernement de la République sous l’impulsion du chef de l’État Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, ce projet a suscité un grand espoir de la part de la population du Tanganyika qui attend bénéficier des retombées subséquentes en terme d’emplois, d’amélioration des infrastructures de base et d’émergence de la classe moyenne locale.
Grâce à l’implication active des fils et filles de la province appuyés par Monsieur Guylain Nyembo Mbwizia également fils du terroir et de surcroît Directeur de cabinet du chef de l’État congolais, la jeunesse du Tanganyika croit en l’aboutissement heureux de cet ambitieux projet dont la matérialisation pourra mettre fin à plusieurs fléaux comme le chômage, l’insécurité,le conflit inter communautaires qui maintiennent toute la population en position de génuflexion et brisent le rêve dune jeunesse épanouie.
Ce tour d’horizon atteste à tout point de vue que le Tanganyika a la vocation d’être un Eldorado pour la République démocratique du Congo, une destination touristique de renommée internationale et un havre de Paix pour sa jeune et enthousiaste population.
Malheureusement, cette province n’échappe pas au glaive de la mauvaise gouvernance endémique qui caractérise les États subsahariens avec sa cohorte des conséquences comme le Tribalisme, le népotisme, le détournement des deniers publics qui plombent son développement et mine l’émergence d’une société responsable.
Le Tanganyika est en proie à des querelles intestines récurrentes, des divergences politiques visiblement surmontables mais par manque de maturité et de sursaut d’ego, ces divergences prennent généralement le dessus sur la raison et contribuent négativement au déchirement de la société.
Depuis 2015 à ce jour, le Tanganyika offre à face du monde la piètre image d’une province doublement pauvre :
- Pauvre par manque d’une élite résiliente, consciente et capable de se projeter dans le futur et d’engager toute la population dans une dynamique de progrès multisectoriel qui implique l’atteinte des objectifs de développement durables ;
- Pauvreté dûe à l’incapacité managériale à non seulement résorber les différends qui sont d’ailleurs inhérents à la vie en société, mais de développer des aptitudes prémonitoires indispensables à la prévention des conflits en société. Les leaders de la province du Tanganyika sont visiblement plus préoccupés par leur survie personnelle que par le sort de toute la province dont l’existence même est gravement menacée à la fois par la montée inexorable des eaux du lac Tanganyika à kalemie, des inondations à travers de tous les 6 territoires mais surtout par l’enracinement des conflits politiques avec leur dangereuse ramification tribale qui risque, comme personne n’y prend garde, de dynamiter toute la province au moyen d’une guerre civile dévastatrice. Tous les signaux sont pourtant clairs. La méfiance entre tribus est bien perceptible, les discours d’incitation à la haine de l’autre sont tenus pendant le jour et à visage découvert ; l’unité entre filles et fils de la province vole en éclats aux vu et su de tout le monde. Telle une maison remplie d’explosifs autour de laquelle gravite un gamin avec entre ses mains une boîte d’allumettes, le Tanganyika est bel et bien au bord de l’implosion.
Deux choses sont à mon humble avis, à la base de cette situation alarmante:
- D’une désorganisation sociétale aiguë, désorganisation délibérément entretenue par une élite totalement dépourvue d’ambitions, de vision et d’idéal;
une élite dont l’incapacité managériale exacerbe les tensions intercommunautaires, alimente des guerres fratricides, ravive les rivalités tribales au point d’hypothéquer tout espoir de développement de cette entité où tout est presqu’à la portée de mains. - La non maîtrise du système démocratique voulu par le constituant de 2006.
S’il est impérieux que tout État moderne se gouverne grâce aux lois et autres règlements démocratiques, il reste tout aussi indispensable que ces lois et règlements doivent être vulgarisés de manière à ce qu’ils ne soient pas source d’ambiguïté, de conflit de compétences qui mettaient en péril l’harmonie nécessaire à la vie en société. Surtout que la séparation des pouvoirs reste l’un des principaux piliers de la démocratie représentative voulue par la République démocratique du Congo.
Le tâtonnement constaté dans la gestion des institutions Provinciales depuis 2015 à ce jour résulte en grande partie non seulement d’un manque criant de maîtrise des rouages institutionnels et d’instruments juridiques par les animateurs attitrés mais aussi de la complexité voire de la vacuité des textes législatifs sensés régenter notre société.
A celà, il faut ajouter la tentation hégémonique sournoise parfois involontaire des acteurs politiques kinois ou des tenanciers du pouvoir central dont la tendance générale est de caporaliser les institutions Provinciales au profit de leurs visées politiques.
La démocratie tant recherchée par le peuple vire au déferlement de haine qui empoisonne le progrès et étouffe les initiatives de développement. Il est temps que le fils du Tanganyika se réveille de son profond sommeil. Il ya péril en demeure. c’est inacceptable qu’une province ayant à son actif: deux chefs d’État, un premier ministre, deux Gouverneurs de la banque centrale, plusieurs hauts fonctionnaires tant au niveau national qu’international, des professeurs d’université de renommée internationale, des chefs d’entreprises, des élus nationaux et autres notables de haute facture soit la risée du monde. Pendant ce temps, le manque de bibliothèques, d’ambulances, de morgues dignes, d’hôpitaux modernes, d’écoles… devrait nous interpeler plus que toute autre motivation.
La survie de notre peuple face à la montée du niveau du lac et au déferlement de ses eaux est plus qu’une urgence. Les générations futures nous jugeront !
Joseph Mulunda Simba.
Ancien candidat Gouverneur du Tanganyika .