Depuis peu le continent africain est sous le choc des coups d’Etat dans certains pays où la démocratie est souvent fragile.
Apres la Guinée, le soudan a été le théâtre d’un coup de force de l’armée qui a renversé le gouvernement civil. Ce retour du spectre des coups d’état qui plane au sommet du pouvoir en Afrique suscite des questions dans le chef des observateurs soucieux de la paix et de la stabilité sur le continent.
Dans ce focus nous vous proposons l’avis d’un expert.
Il s’agit de celui Frédéric Amani, enseignant à l’’Ecole Supérieure de la Gouvernance Economique et Politique de Lubumbashi (EcoPo).
Pour cet internationaliste, les causes des coups d’état en Afrique sont multiples. Cela part de la mauvaise gestion de la chose publique et de la fragilité démocratique : »je crois que cette recrudescence des coups d’Etat en Afrique peut avoir comme cause majeure ; la mauvaise gouvernance de la plupart des Etats Africains et cela se comprend bien par la détérioration des conditions de vie de populations africaines.Ensuite, cette recrudescence des coups d’état peut s’expliquer par la défaillance de la démocratie africaine, mais moi j’irai même plus loin en évoquant aussi la défaillance de systèmes politiques africains, lesquels systèmes n’ont pas pu permettre à l’Etat en Afrique de bien répondre à ses missions régaliennes comme c’est le cas ailleurs. »
Un continent des hommes forts?
Fréderic Amani fustige aussi l’affaiblissement des institutions publiques dans certains états Africains. Ces Etats qui ont réussi à créer des hommes forts plutôt que des institutions fortes et qui au finish sont fragiles selon lui: » En plus, cette recrudescence des coups d’Etat en Afrique s’expliquerait par le fait que l’Etat s’incarnerait en des hommes d’Etat forts au lieu que l’Etat soit incarné par les institutions fortes et cela présente beaucoup de conséquences. Ainsi les peuples africains se retrouvent face à un Etat patron [pour reprendre l’expression de Bertrand Badie] au lieu d’être un Etat régulateur.«
Défaillance démocratique ou complot occidental ?
Des spécialistes de l’Afrique évoquent toujours des raisons diverses qui conduisent aux coups d’état en Afrique. Les plus africanistes pensent même qu’il faille calibrer la démocratie à l’Africaine, en tenant compte des coutumes, mœurs du continent noir.
A ce sujet Fréderic Amani évoque deux théories:
» Je préfère parler plutôt de la théorie de complot que celle de bouc émissaire. Mais toutes les deux peuvent, à certains égards être évoquées. Cependant, là aussi il faut beaucoup nuancer. Votre question me permet d’évoquer les deux caractéristiques des relations internationales, celle de savoir que, de tous les temps, les Relations internationales ont toujours été de relations d’intérêts entre acteurs et de deux, les relations internationales entre acteurs sont caractérisées par les rapports de force. «
Les dirigeants Africains sont-ils des gouvernants libres et indépendantes vis -à –vis de l’occident ? Certains ne sont-ils pas fabriqués dictateurs pour servir les intérêts des européens, américains et asiatiques avant de se faire éjecter plus tard par coup d’état ?
Notre expert des questions internationales voit l’Afrique au vue de ses immenses richesses, au centre des intérêts du monde:
« Ensuite il faut savoir qu’en politique on n’est pas éternel ami ou éternel ennemi, et les alliances (soutien) se font, se refont…car tout est fonction du gain (intérêt) qu’on tire en soutenant tel ou tel acteur. Actuellement, l’Afrique représente un enjeu stratégique majeur dans la mondialisation et que son basculement d’un camp (ses partenaires traditionnels : USA et UE) vers un autre(les puissances émergentes, en l’occurrence de la Chine ou de la Russie) ne pourra pas être vu d’un bon œil.«
Le continent Africain est assez mûr pour marcher seul et se développer sans dépendre des Etats déstabilisateurs ; ceux qui se considèrent comme sentinelles du monde.
L’Afrique est la mère nourricière du monde, elle doit cependant être l’artisan de son propre développement.
Fréderic Amani est de ceux qui croient en la maturité de l’Afrique: « Plus de 60 ans après les indépendances, l’Afrique est assez mature pour prendre sa destinée en main en travaillant, au regard de potentialités dont elle dispose, pour ce qu’elle veut être car son développement en dépend. «
En fin, il condamne les coups d’Etat. S’appuyant sur le vivre ensemble, le mieux-être et la bonne organisation de la cité qui ont toujours caractérisés les sociétés africaines ; Fréderic Amani ne doute pas de la bonne fois des militaires qui sont souvent indexés dans les coups de force.
Aussi, les dirigeants doivent tirer les leçons de ce qui se passe sur le continent pour changer le cours des choses. Cela va du respect des mandats constitutionnellement reconnus à un président de la république et de la gestion orthodoxe des deniers publics.
Mandela LONGA