Le sommet Etats-Unis/Afrique s’est ouvert ce Mardi 13 Décembre à Washington aux Etats-Unis ; après le premier organisé en 2014 par l’Administration Obama. Les dirigeants de 49 pays Africains et de l’Union Africaine prennent part à ces travaux de trois jours axés sur les questions sécuritaires, économiques, sanitaires et celles liées au changement climatique.
Du 13 au 15 Décembre 2022, plusieurs chefs d’Etats Africains à l’exception de ceux du Mali, du Burkina-Faso, de la Guinée Conakry et du Soudan sanctionnés par l’organisation continentale (Union Africaine) à cause de leur prise de pouvoir par de moyens non constitutionnels, y prendront part pour revitaliser les relations politiques et économiques surtout entre ces deux continents et débattront de plusieurs sujets mais dont le thème central de ces assises reste la paix et la sécurité en Afrique.
Des attentes des pays Africains
Pour Frédéric Amani ; chercheur associé en sciences politiques et relations internationales à L’université de Lubumbashi et consultant indépendant des questions internationales ; la tenue de ce sommet vient rompre avec l’unilatéralisme Trompisme où le prédécesseur de Joe Biden, Donald Trump ne cachait pas son désintérêt vis-à-vis du continent noir, arguant haut et fort que l’Amérique ne devait pas s’occuper de tous les problèmes ou malheurs du monde, mais qu’elle avait plutôt vocation de s’occuper de ses propres problèmes, voilà la raison de son courant《Le Trumpisme》ou, (America first).
Il croit que pour l’Administration Biden, ce sommet vient revitaliser le multilatéralisme auquel l’Amérique tient beaucoup pour son rayonnement et son influence dans le monde.
Quel argument pour la RDC ?
Frédéric Amani souligne que la République Démocratique du Congo fait figure des pays attendus à cette grand-messe diplomatique dans un moment où elle fait face, plus de deux décennies maintenant, à une insécurité chronique aux conséquences fâcheuses dans l’indifférence de la Communauté internationale.
Pour cet expert des matières internationales ; la RDC pourra participer à ce sommet avec 2 ou 3 arguments à savoir, un argument Défensif, un argument Offensif et un plaidoyer.
▪L’argument Défensif :il faudrait que la RDC y aille en défendant mordicus sa Souveraineté en tant que Etat, ses convictions vis-à-vis de ses belligérants (M23, Rwanda, Ouganda…).
▪L’argument offensif ; celui-ci se comprend l’offensive diplomatique que devrait continuer à exercer la RDC dans les instances internationales et surtout auprès de ces partenaires de pays qui soutiennent les protagonistes dans l’insécurité et la déstabilisation de la RDC.
▪L’argument de plaidoyer ; ici la RDC pourra faire un lobbying en sa faveur auprès de ceux qui l’entendent notamment les Etats-Unis en dénonçant ce qu’on peut qualifier de l’indifférence et l’hypocrisie de la Communauté internationale et de ses partenaires par rapport aux atrocités commises (crime contre l’humanité, génocide,) dans la partie Orientale de la RDC.
Frédéric Amani propose que la République Démocratique du Congo y aille en tant qu’Etat stratège, en se servant de ce sommet pour engager un dialogue franc et constructif avec les Etats-Unis qui restent malheureusement jusqu’à ce jour, partenaire privilégié du Rwanda. Ce dialogue franc et constructif permettra de bien clarifier l’apport significatif de Washington dans les efforts du rétablissement et consolidation de la paix et la sécurité à l’Est de la RDC et dans la région des grands lacs, y compris aussi la question de l’embargo et le jeu de Ping pong que semble jouer y compris aussi les USA au regard du système de notification pour l’achat d’armes ; et lui permettre ainsi d’avoir le moyen de sa défense pour faire face à cette guerre lui imposée par l’extérieur et restaurer l’autorité de l’Etat.
Quel profit pour le continent Africain ?
Frédéric Amani évoque les raisons pour lesquelles l’Afrique est un partenaire stratégique des Etats-Unis d’Amérique de par ses multiples ressources stratégiques recherchées aujourd’hui dans les industries et nouvelles technologies, de par les opportunités qu’offre l’Afrique en tant que champs « au sens de Pierre Bourdieu » de rivalités entre différents acteurs, …
A l’en croire, tout dépendra de la capacité du continent à se mobiliser afin de tirer profit de ce partenariat qui se veut « stratégique » pour qu’elle aboutisse à de coopérations à somme multiple, ou (gagnant-gagnant) pour reprendre l’expression chinoise.
Sans minimiser la capacité des USA de contribuer à la paix et la sécurité en Afrique, Frédéric Amani souligne que ces fléaux ont beaucoup plus de causes profondes internes au continent, dont la mauvaise gouvernance dont il pense que lors de ce sommet, le Président Américain Joe Biden ne s’y attardera pas devant ses homologues africains sur cette épineuse question. Mais par contre Joe Biden tentera de vouloir convaincre les africains du soutien américain aux effets néfastes du réchauffement climatique dont l’Afrique reste la principale victime et pas le principal responsable.
Parce que toute action diplomatique repose sur l’intérêt ; il ne croit pas que les Africains puissent bénéficier grand-chose de ce sommet.
Les USA sous pression ?
Frédéric Amani n’y va pas par le dos de la cuillère pour qualifier les ambitions américaines face aux enjeux de l’heure. Il sent que les USA sentent et craignent l’expansion et la pression de la Chine et de la Russie, mais il ne faut pas oublier que la scène internationale est un terrain de rapports de force et c’est le plus fort qui l’emporte. A ce sujet il voit la volonté de repositionnement des USA comme un partenaire privilégié et stratégique d’autant plus que les USA veulent montrer à l’Afrique qu’ils sont à leurs côtés pour qu’ensemble, ils relèvent les défis de la paix et de la sécurité, du réchauffement climatique, celui de l’immigration, de la santé en passant par celui de la famine qui amenuisent tous les projets de développement en faveur de l’Afrique.
« Dommage que l’Afrique jusqu’à présent, n’a pas encore pris conscience de ce qu’elle représente aujourd’hui en tant qu’acteur » poursuit ce spécialiste vivant à Lubumbashi car pour lui ; «le sommet Etats-Unis/Afrique apparait comme appas (soft power) des USA pour l’Afrique en plaidant en sa faveur pour son intégration dans le G20 mais aussi au sein du Conseil de Sécurité, la réalité est que cela, me semble-t-il, c’est de la poudre aux yeux des Africains car il me parait que ces incantations américaines trouvent échos favorable auprès des africains, mais je doute de leur effectivité, Wait and See» dit-il.
Frédéric Amani voit des effets extérieurs à l’Afrique dont la crise sanitaire de COVID19, d’un côté et la guerre en Ukraine de l’autre, qui ont occasionné entre autre, une crise économique dont le monde est entrain d’en payer le prix et qui plongent les grandes économies du monde en récession y compris les USA, d’où sa volonté de contrer par tous les moyens l’expansion et influences des économies émergentes la Chine et la Russie en premier lieu.
En fin il conclut que l’Afrique et à la RDC doivent sortir de leur léthargie et du paradigme d’enfermement en privilégiant l’intérêt Général au nom et pour lequel ils agissent.
Mandela LONGA