Ça semble déjà une éternité depuis le départ brusque du maire titulaire de la ville de Lubumbashi.
Aux dernières nouvelles, il était attendu à Kinshasa pour une audition par le ministre de l’intérieur.
A la base, la dispersion brutale, quelques jours plutôt, d’une marche organisée par les cadres katangais. De grandes personnalités de la classe politique katangaise dont quelques députés nationaux et provinciaux qui participaient à cette marche pacifique pour l’unité katangaise avaient été sauvagement tabassées par des agents de l’ordre ordonnés d’interdire la manifestation. Ghislain Lubaba devait alors s’expliquer entant qu’autorité urbaine, même si jusque-là personne ne connaissait la vraie origine de l’ordre reçu par les policiers.
Pendant ce temps, l’hôtel de ville sera remis entre les mains de son adjointe, dans un premier temps, en attendant que Lububa convoqué à Kinshasa, revienne poursuivre son mandat légalement reçu.
Dans les coulisses, avant même qu’il ne prenne son vol inattendu, des rumeurs circulaient autour des auteurs de l’ordre à la base des bavures.
La plupart présentaient même Lubaba comme un simple innocent.
Les victimes elles-mêmes rapportaient avoir été le jour de la manifestation avec le maire de la ville de qui ils auraient reçu l’autorisation de marcher.
Mais cela ne suffit pas pour exclure la responsabilité de la première autorité de la ville dans cette affaire à laquelle elle semble être naturellement collée.
La veille de son départ, il serait d’abord convoqué à l’Assemblée provinciale avec quelques membres du gouvernement provincial. Pourquoi? Personne ne le sait.
Mais vu l’agitation, on pouvait supposer une certaine implication, à quelques niveaux, des autorités plus hautes que la mairie.
En s’en tenant aux organisateurs de la marche, l’hôtel de ville avait déjà donné son aval. Donc, ils pouvaient, pour la mairie, manifester.
Mais qu’est-ce qui ferait que la mairie change si brusquement d’avis pour passer de l’autorisation à l’interdiction ?
Pour nombreux, si c’est réellement la mairie qui a ordonné aux policiers de disperser les manifestants, alors il est fort probable qu’elle soit également victime d’un ordre venu de plus haut et qu’elle ne devait qu’exécuter.
Mais si cela est vrai, pourquoi Lububa voudrait-il le cacher?
La fameuse réunion à l’Assemblée provinciale pourrait nous aider à comprendre tout ce qui trame derrière cette affaire.
Mais il semble bien possible qu’elle ait été une occasion pour les uns et les autres de se jurer fidélité, ça veut dire, la vérité devait demeurer cachée en échange des quelques avantages.
Cela dit, le but de cette rencontre improvisée serait de faire porter à Lubaba seul le fardeau même si tout le monde soupçonne une forte implication.
Ça marche comme dans plusieurs scénarios faits à la congolaise.
Mais on en est plus là. La question actuelle, c’est qu’elle a été la décision du ministre de l’intérieur après l’audition de Lububa ?
Du temps que personne ne sait si cette audition a véritablement eu lieu, il est difficile de savoir ce qu’en a été l’issue, si Lubaba a été reconnu ou non coupable.
On dirait que le dossier n’a même pas encore été ouvert à voir le silence qui y plane.
Mais comme officiellement Lubaba n’a jamais été démis de ses fonctions, il est tout aussi possible qu’il continue à percevoir son salaire normalement.
Et donc, il n’a jamais été question de culpabiliser quelqu’un, mais plutôt de faire disparaitre la vérité.
Le ministère a utilisé Lubaba comme une simple diversion. Ainsi, les victimes peuvent se dire avoir trouvé leur gain de cause, alors qu’en réalité, il s’est agi d’un jeu, comme tous les autres jeux. Mais cela n’efface pas les dizaines de coups reçus au visage ou l’humiliation infligée aux manifestants. C’est tout simplement une façon modeste de se moquer d’eux.
Jean MBAYO